Les Croix de Chemin de Vagney

Introduction à l’étude des croix de Chemin de Vagney

En premier lieu, l’Histoire d’un village se déchiffre dans les documents d’archives paroissiales et communales. Mais c’est autour de ses édifices locaux, église, chapelle, fontaine, ancienne ferme…qu’elle se raconte et qu’elle se lit.
A Vagney, l’Histoire peut aussi se conter, pour qui sait regarder, au long du chemin de ses trente croix.
La croix du Collecteur, située Chemin des Tilleuls, datée de 1602, est la plus ancienne.
La croix du Xaté, érigée aux Ejols, date de 1839 ; elle est la plus récente.
Bien sûr, nos croix de chemin n’ont peut-être pas toutes la splendeur des calvaires bretons, la prestance des hauts calvaires alsaciens, la diversité des croix à panneau-retable et autre bildstock de la région mosellane, ni même la richesse des croix de la plaine des Vosges.
Mais ce sont les nôtres, érigées lors de circonstances locales précises et à ce titre elles nous sont précieuses. Croix votive, croix de peste, croix de choléra, croix d’accident, croix de meurtre, croix de carrefour, ouvragée ou humble, les motivations qui ont conduit à leur érection sont multiples mais ne sont pas toujours parvenues jusqu’à nous.
Certaines d’entre elles sont tellement intégrées à notre paysage quotidien que nous ne savons même plus les voir : autant que des atteintes du temps, des conflits, des engins et véhicules, du vandalisme, c’est de notre indifférence qu’elles ont le plus souffert et qu’elles souffrent encore. Ne donnons pas raison à l’historien Michelet qui, au XVIII ème siècle déjà s’exclamait ainsi :
’’ Hommes grossiers, qui croyez que ces pierres sont des pierres, qui n’y voyez pas circuler la sève de la vie…’’
Ainsi, lorsqu’au détour d’un sentier, à proximité d’une ruine, en plein champ, au coeur de la forêt ou au bord de la nationale, nous découvrons l’un de ces petits monuments populaires, interrogeons-nous : de quel événement, heureux ou douloureux est-il le témoin, qu’ont vécu nos ancêtres, si intensément, qu’ils ont souhaité l’immortaliser dans la pierre ?
Passent les ans, passent les siècles, passent les hommes…qui pourra nous renseigner aujourd’hui ?
La tradition orale, qui se perpétue heureusement mais qui ne peut toujours avoir valeur de document, les inscriptions gravées sur le socle, lorsque les intempéries les ont épargnées, la datation, lorsqu’elle existe, le style du monument, la richesse de ses sculptures sont autant d’éléments de base pour une recherche sur l’origine de nos croix, pour une approche de notre Histoire, la Petite, mais jamais isolée de la Grande…
Un fait est certain, c’est toujours la foi qui a poussé nos ancêtres à édifier les croix de chemin, la croix demeurant avant tout le symbole de la religion chrétienne.
Il y a peu de temps encore, quelques décennies tout au plus, les croyants ne passaient pas devant les croix sans les saluer du signe …de la croix, justement. Les processions de Fête Dieu et de Rogations s’y arrêtaient, les habitants du quartier ou les enfants du catéchisme les fleurissaient, certains Voinrauds n’ont pu l’oublier…
Longtemps en péril, trop discrètes pour interpeller les instances culturelles, jamais inventoriées officiellement (1), fortes d’une puissance émotionnelle séculaire, elles sont notre Patrimoine, celui qui nous fut prêté par nos ancêtres et que nous sommes tenus de rendre à nos enfants, au moins dans le même état (2), si possible amélioré !
Mémoire de pierre vivante de notre village, elles sont placées sous notre sauvegarde et celle de la municipalité, disposée à leur donner au coeur de notre quotidien la place qu’elles méritent.
A l’an prochain pour évoquer leur architecture et leurs origines.

Danièle Perrin

(1) Elles le furent en 1997 par la classe de CE1 de Danièle Perrrin, école du Centre de Vagney et firent partie du ’’ CD-Rom des écoliers’’

(2) La croix dite Fourrier, située rue Robert Claudel, ’’bousculée’’ par une automobile en 2004 vient d’être relevée grâce à la coopération entre la municipalité, les services techniques municipaux, et l’ARSHV, association des Amis de Remiremont et des Sites des Hautes Vosges, impliquée dans le sauvetage de nombreuses croix dans la région.